La prise en charge du patient âgé
Ramenée au contexte de la santé, la question de la relation de service renvoie à l’implication des deux parties prenantes - patient et soignant - et à la mobilisation potentielle de leurs ressources respectives pour nourrir et faire vivre cette relation de soins. Si cet engagement est acquis dans le cadre d’une relation dite « normale », cette question prend une autre tournure lorsqu’il s’agit d’une relation qui concerne des publics vulnérables. En effet, dans ce dernier cas, les deux parties prenantes semblent à première vue s’inscrire dans un rapport asymétrique au profit de l’organisation (ici l’établissement de santé) et de ses agents (personnel de soins) qui peuvent se prévaloir d’une légitimité dans l’administration des soins fondée sur leurs compétences. Cette asymétrie est amenée à se refléter dans les pratiques d’administration de soins qui vont se (re)configurer le long des expériences de service avec les patients. Il est ainsi possible de lier les représentations du patient âgé vulnérable chez les soignants à une déclinaison de pratiques de soins qui aboutit à des instrumentalisations variées de la vulnérabilité soit pour accentuer la tutelle et le contrôle sur ce dernier, soit au contraire pour se délester de certaines tâches rentrant dans la relation de soins sur cette population (avec une palette de situations intermédiaires liées à la variété des contextes d’interaction avec les malades) dans une visée d’efficience. A l’opposé de cette vision incapacitante, on peut entrevoir une autre perspective consistant à considérer la diversité des situations de vulnérabilité rencontrées par les patients âgés et à les définir comme des individus qui ne subissent pas la relation de soins car disposant de ressources et de latitudes pour faire entendre leur voix et défendre leurs intérêts. Cette perspective ouvrirait ainsi la voie à davantage de coproduction des soins, à un « faire avec » les patients âgés dit vulnérables. Entre ces deux visions contrastées, la réalité est probablement beaucoup plus nuancée. Ces réflexions liminaires nous amènent ainsi à formuler les deux questionnements suivants auxquels nous tenterons de répondre dans ce papier : Comment et en fonction de quels référentiels et signaux renvoyés par le patient âgé « vulnérable », les soignants configurent-ils la prise en charge de ce dernier? Et dès lors, comment ces représentations se cristallisent-elles dans les pratiques de soins ?
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